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Comment la presse nous a désinformés sur l'Irak

Le problème avec les bons livres, c'est qu'ils induisent les chroniqueurs à la paresse, écrivait je ne sais plus quel chroniqueur (était-ce Jean-François Revel?) : On a envie de tout recopier. C'est cette réflection qui me vient à l'esprit en ouvrant La Guerre à Outrances : Comment la presse nous a désinformés sur l'Irak. En tant que journaliste free-lance depuis 15 ans, je le dis sans retenue : le livre de Alain Hertoghe devrait doréanavant faire partie des lectures obligatoires de toutes les écoles de journalisme francophones sans exception.

Alain Hertoghe a décrypté la façon dont cinq quotidiens français (Le Monde, Libération, Le Figaro, La Croix et Ouest-France) ont couvert la guerre d'Irak

explique le dos du livre.

Consciemment ou inconsciemment alignée sur les positions antiguerre de l'Élysée et du Quai d'Orsay, le jugement obscurci par le Schadenfreude, la jouissance que l'on éprouve secrètement devant le malheur d'autrui, [la presse] en vint à oublier les règles les plus élémentaires du journalisme.

On ne s'étonnera donc pas que je considère que ce livre sur "l'encre partisane et passionnelle" s'inscrit dans la lignée des exemples dans ma rubrique sur l'anti-américanisme dans les médias.

Voici quelques extraits :

Introduction et Présentation

À la lecture des articles qui leur sont consacrés pendant les trois semaines de conflit, il est flagrant que les quotidiens ne peuvent pas ou ne veulent pas maintenir une distance raisonnable avec l'atmosphère passionnée qui s'est emparée de la France. Au contraire, ils vont s'y associer sans retenue, voire l'exacerber. Leur couverture des hostilités en Irak en sera largement conditionnée.

[Pendant toute la durée du conflit,] George W. Bush et ses 280 millions de concitoyens sont caricaturés, voire diabolisés. De ce fait, ils se retrouvent rapidement disqualifiés en tant qu'amis et alliés, mais aussi en tant qu'êtres humains intelligibles par les habitants sages et cultivés du vieux continent. À lire les quotidiens français, l'Amérique semble n'être peuplée, à l'exception d'une poignée d'admirables pacifistes, que de déplaisants « patriotes », écervelés, égoïstes et violents. Quant à leurs dirigeants, ils se révèlent bellicistes, ignares et irresponsables, voire à la limite de la démence clinique. … ce sont de surcroît des « fous de Dieu » dont les plans, censément inspirés par une source divine, mettent la planète en danger. Rien de moins…

Heureusement, comme dans toutes les bonnes histoires, face aux méchants, il y a les bons, toujours disponibles pour les nobles causes. Les quotidiens n'auront de cesse de rassurer les Français : ils peuvent compter sur Jacques Chirac et Dominique de Villepin pour se dresser avec calme et détermination sur le chemin de fauteurs de guerre « illégale ». …

Pendant toute la durée du conflit, les journaux s'efforcent … de démontrer que l'argumentaire de la France reste le seul raisonnable, que l'avenir le prouvera et que sa stature internationale sortira grandie de la crise. Cette analyse a pour corollaire obligé que … la presse a eu cent fois raison de s'aligner depuis des mois sur les dirigeants du pays. De ce fait, le couple Chirac-Villepin ne représente plus seulement une ligne diplomatique face à une autre, dans un débat et les torts peuvent être pesés par les journalistes, où sont analysés des visions du monde différentes, métissées d'intérêts nationaux divergents. Jacques Chirac et Dominique de Villepin incarnent bien davantage : ils sont la France debout « face à l'Histoire et devant les hommes », pour reprendre l'expression grandiose du ministre des Affaires étrangères. …

Que la presse quotidienne ait fait sienne, sans guère de nuances, la ligne diplomatique du couple Chirac-Villepin, c'était son droit, même si cela n'honore pas l'objectivité qu'elle révendique. En revanche, il est inacceptable que, concernant le déroulement du conflit, elle mente par omission ou exagération, à la seule fin d'apporter de l'eau à son moulin. Ces mensonges ont rendu incohérentes les informations qu'elle fournissait au fil des trois semaines de guerre. Elle a du reste été systématiquement démentie par les faits. Et le dénouement a laissé le lecteur logiquement sidéré. …

Planter le décor idéologique dans lequel la presse française rend compte des opération militaires en Irak est indispensable. Car ce triple prisme partisan — diaboliser l'administration Bush, adhérer à la ligne du couple Chirac-Villepin et communier avec les opinions publiques antiguerre — témoigne de l'état d'esprit qui règne dans les rédactions au moment de couvrir le conflit. Il va provoquer un dérapage journalistique collectif à la mesure du climat passionel qui a régné autour de la crise irakienne.

Le reste du livre est fait d'exemples concrets et irréfutables de ce triple prisme partisan.
Voici quelques exemples du "déséquilibre de la couverture du conflit par la presse française" :

Railleries sur la Coalition de Dobeuliou

[L'article d'un correspondant à Washington] veut démontrer que les Américains sont isolés et que leurs alliés ne pèsent pas lourd. « Les États-Unis ne sont pas seuls pour la guerre à l'Irak : ils peuvent compter sur l'Érythrée, l'Albanie, l'Islande, la Lettonie… », ironise-t-il. En lisant plus avant son article, on découvre incidemment que la Grande-Bretagne, le Japon, l'Australie, l'Espagne, la Pologne, le Danemark font partie de la « coalition des volontaires ». Mais un seul pays vous manque — la France —, et tout est dépeuplé! Le Monde s'amuse aussi en page une de la coalition américaine. … on a également droit à la liste des alliés « inutiles » : Pays-Bas, Mongolie, Rwanda, Albanie, Costa Rica, îles Marshall, royaume de Tonga… Ce ne sont pas les États-Unis et la Grande-Bretagne qui auraient, à l'instar de la France et de l'Allemagne, des puissances de la stature de la Belgique et du Luxembourg derrière eux dans la « coalition des volontaires »

Il est vrai que "Ce n'est pas rien, le renfort" du Grand Duché, pour construire la défense européenne!

…donnée éclairante, on ne relève que 29 titres condamnant le dictateur irakien et son régime, tandis qu'on en compte 135 blâmant George W. Bush, son administration et son allié anglais (parce qu'ils sont impérialistes, violents, irresponsables et fondamentalistes). Ce traitement asymétrique des deux protagonistes de la guerre en dit long sur l'obsession négative qu'inspirent à la presse francaise le président américain et, par extension, le premier ministre britannique. …

[Une] rare plongée dans l'atmosphère qui règne au sein de l'administration Bush avant la guerre n'est pas non plus relatée par les journalistes français. Sans doute parce que cela ne correspond pas à l'image qu'ils veulent donner de Donald Rumsfeld et de l'ensemble de l'administration Bush. Délibérée ou non, cette omission permet aussi d'accuser les « bellicistes » de Washington d'avoir vendu avec arrogance la peau de l'ours irakien avant de l'avoir tué.

La communion avec le camp de la paix

[La] voix de ceux qui estiment que Bush et Blair n'ont peut-être pas totalement tort de vouloir renverser Saddam Hussein se retrouve pratiquement étouffée par cette chape de pensée unique. Pourquoi ce zèle, qui évoque parfois la célébration du 1er mai dans le monde par la Pravda soviétique ? Parce que, rangée dans le « camp de la paix », la presse se réjouit de cette caution de la rue et de l'opinion publique qui vient corroborer ses choix éditoriaux et faire la démonstration de sa grande clairvoyance. Avec Jacques Chirac, Dominique de Villepin, le pape et le reste de l'Humanité — les Anglo-Saxons exceptés — elle défend la civilisation. Elle la protège contre les fauteurs de guerre préventive, unilatérale, illégale. …

Pendant les trois semaines de la guerre d'Irak, les quotidiens maintiennent donc la fiction d'une diplomatie française qui, après avoir mis en échec l'Amérique au Conseil de sécurité avant le conflit, reste l'acteur central de la politique internationale. Exploitant les déboires de la coalition en Irak, divisant cette dernière pour mieux préparer son prochain règne, et ramenant lentement le chenapan Tony Blair dans le bercail européen : voilà la France victorieuse avec le soutien des peuples de la Terre entière. Aux quatre coins du monde, son message de défense de la paix et du droit international aurait été entendu. Les journaux le martèlent à coups de reportages, de portraits et de sondages jour après jour, édition après édition, du début à la fin de l'opération « Liberté en Irak ». …

L'éditorialiste du [Monde] ne se prononce pas sur la révélation stupéfiante qu'un tiers de l'opinion désire un succès du tyran irakien sur les alliés traditionnels et démocratiques de la France. [Il est vrai que] cela l'obligerait ici à s'interroger sur la manière dont les Français sont informés. On peut d'ailleurs voir un aveu général de profond malaise dans l'absence totale de commentaires de la part des rédactions en chef des autres quotidiens [à l'exception de celui — indigné — d'Ivan Rioufol dans sa rubrique du Figaro].

Décidément, les rédactions n'aiment pas s'appesantir sur ce qui pourrait parasiter l'image du mouvement anti-guerre.

Le rapport avec les médias américains

Les médias français entretiennent depuis toujours un étrange rapport de fascination-condescendance à l'égard du journalisme américain. À l'occasion de la crise irakienne, ils vont ainsi brocarder son aveuglement patriotique, son alignement sur le Pentagone, faire le procès d'un manquement général à l'éthique journalistique et… piller sans vergogne cette source inépuisable d'informations, d'analyses et de prévisions, d'autant plus séduisantes que des illustrations multimédias les accompagnent. …

La presse quotidienne française joue volontiers les donneuses de leçons, notamment à l'égard de l'audiovisuel et du journalisme américains. Elle a d'ailleurs fait le procès médias d'outre-Atlantique pour leur couverture partisane de la guerre d'Irak. Or, quelle a été son attitude au cours du conflit? Elle a elle-même donné une version plus patriotique que journalistique des évènements. Ce qui a en fin de compte abouti à une désinformation exemplaire de ses lecteurs.

Moqueries des GI et de leurs stratégie et tactiques :
"On pouvait redouter le pire" des quotidiens français, "c'est encore pire que prévu"

Cela fait seulement 72 heures que les troupes américano-britanniques ont franchi la frontière koweïtienne. Quant à la campagne aérienne intensive sur l'Irak … elle ne dure que depuis 48 heures. Néanmoins … le thème de l'enlisement apparaît déjà en pointillés dans les quotidiens. C'est dire l'impatient désir qui habite les rédactions de voir les Américains et les Britanniques souffrir dans leur entreprise. L'avantage d'avoir adopté sans nuances le pronostic d'une guerre éclair, c'est qu'aux premières anicroches on peut déjà dramatiser. Le cadre d'un dérapage médiatique généralisé est désormais en place.

…la presse hexagonale reste totalement concentrée sur la douce revanche qu'elle croit tenir contre ceux qui ont osé dédaigner le « camp de la paix », la France et ses journalistes éternellement lucides.

[Le 1 avril,] Serge July … s'accroche à son idée fixe : « le scénario du pire ». Attention, c'est parti ! « On pouvait redouter le pire, c'est encore pire que prévu, se régale le directeur de Libération. L'échec de la parade militaire américaine dans le désert, destiné, en principe, à faire imploser la dictature en quelques jours, est un revers pour Donald Rumsfeld et toute la bande des Folamour de la démocratie de force ». Il pressent néanmoins que « la satisfaction sera fugitive.» Car nous allons assister à une « vraie guerre ». Devant « l'impératif de gagner à tout prix », les États-Unis vont faire des « milliers de victimes » dans la population civile irakienne, et ce, en « sacrifiant des centaines de GI, peut-être même des milliers ». Cela restera comme l'éditorial poisson d'avril — involontaire — de Serge July

[C'est ce même jour] qu'Isabelle Lasserre choisit pour donner une leçon de choses militaires à Donald Rumsfeld et ses amis, plus précisément une leçon de logistique. « Les stratèges américains de l'opération "Choc et stupeur" avient-ils relu le vieux traité de "pure logistique" du colonel des marines George Thorpe ? » Non, suppose la journaliste [du Figaro]. Et elle a recours à un militaire français pour se moquer, au détour d'un paragraphe, de ces GI et de ces marines « qui ont besoin de leurs céréales au petit déjeuner et de leur déodorant ». Quelles chochottes … le journaliste d'Ouest-France [lui] s'amuse en évoquant « le fantassin américain, cet enfant gâté de la guerre moderne » qui « redécouvre le combat de rue, le creusement des trous individuels pour s'abriter »."

[Au lendemain de la chute de Bagdad, c'est évidemment] « choc et stupeur » dans les rédactions et chez les lecteurs des quotidiens français qui ne pouvaient pas s'attendre, au vu des informations qui leur étaient données, à un tel coup de théâtre : comment les Américains ont-ils pu faire sans les indispensables renforts ?

Les « bavures » des forces américaines

…la véritable tragédie humaine de la guerre d'Irak est évidemment, comme pour chaque conflit, celle des victimes civiles des opérations militaires, que ce soient les bombardements ou les combats au sol. De manière générale, la presse française n'exagère pas cet aspect du conflit irakien. Mais elle n'éclaire pas correctement ses lecteurs sur la responsabilité largement partagée du régime de Saddam Hussein dans les « bavures » du conflit. Pas plus que sur l'impossibilité de s'informer à propos de celles-ci hors du contrôle des autorités de Bagdad. Du coup, les quotidiens accréditent l'idée simpliste que l'état-major américano-brittanique mène une guerre sans égard pour le peuple qu'il prétend libérer, une offensive aérienne et terrestre de cow-boys en quelque sorte. Ce qui n'est pas innocent et va dans le sens de leur parti pris éditorial du départ.

[Quand] les quotidiens français publient des dizaines d'articles sur une douzaine de « bavures » de la coalition, ils rendent donc compte d'une réalité aussi tragique qu'incontestable. … Mais il est tout aussi indiscutable que les uns et les autres disposent seulement des informations que la propagande irakienne trouve un intérêt à diffuser ou à laisser écire.

les habitants de Bagdad, ville soigneusement quadrillée par les militants du parti unique et les services de sécurité, ne sont pas nombreux à prendre le risque de livrer le fond de leur pensée à des étrangers aussi bien accompagnés. Ils préfèrent chanter les louanges du maître des lieux et leur volonté inébranlable de résister à l'envahisseur. Et notamment, semble-t-il, à des journalistes venant d'un pays opposé au renversement par la force de Saddam Hussein. [souligné par moi]

Le sculpteur Haider Wady confirma ceci au journaliste Steven Vincent pour le mensuel Reason : une équipe de film l'avait interviewé sur ses sculptures. "Derrière l'interviewer, à côté de la caméra, se tenait un 'ange gardien' et s'ils posaient une question sensible, elle ouvrait grand ses yeux pour m'avertir de ne pas répondre de façon incorrecte ou elle devrait me dénoncer," dit-il. "Bien entendu, si j'avais hésité, ou si mon regard avait été provocant, elle aurait dénoncé cela aussi." Saddam observait toujours, conclut Vincent, Saddam écoute toujours.

Durant leurs sorties en ville, les envoyés spéciaux voient surtout comment le régime imbrique ses combattants et leur matériel dans les quartiers résidentiels. Les pièces de DCA (Défense contre avion) sont installés sur les toits et dans les cours d'immeubles d'habitation, près d'écoles, d'hôpitaux et de mosquées. Ces constatations ne se retrouvent pas dans les articles, même si elles permettraient de mieux comprendre les « bavures ». …

Au lieu de cela, les lecteurs sont abreuvés, jour après jour, des communiqués du ministère de l'Information sur les morts et les blessés provoqués par les bombardements américano-britanniques. Bilans évidemment invérifiables. Tout comme ceux des hôpitaux, cités sans commentaire aucun. [Aucun quotidien n'établit] de correspondance entre ces « carnages civils » et la stratégie de Saddam Hussein de disperser et dissimuler ses soldats, ses blindés et son artillerie dans cette plaine densément peuplé. …

En dépit de ces constats de terrain, aucun journaliste français n'accuse directement l'armée de Saddam Hussein de porter au moins une part de responsabilité dans la « sale guerre » dénoncée par Ouest-France. Enfin, si, il y en a un. Mais il n'est pas publié par sa rédaction en chef. Le reportage d'Adrien Jaulmes ne paraît que dans le Daily Telegraph [avec lequel Le Figaro a des accords éditoriaux]

…Il est regrettable, donc, que les quotidiens de l'Hexagone ne se soient pas émancipés de la propagande irakienne … pour informer leurs lecteurs avec nuances sur les responsabilités partagées de la coalition et dui régime irakien dans le drame des victimes civiles. Mais cela aurait évidemment impliqué de renoncer à décrire l'opération « Liberté en Irak » comme une guerre non seulement « illégale » mais de surcroît menée par des brutes.

La bataille de Bagdad et la victoire des forces alliés

Le fable de la résistance patriotique des Irakiens reste l'élucubration la plus navrante des journaux francais. Si elle avait correspondu à une réalité, c'est vrai qu'elle aurait enlevé à George W. Bush et Tony Blair leur dernier argument : la libération de d'un peuple particulièrement opprimé. Mais fallait-il que la presse ait envie de voir Américains et Anglais mordre la poussière pour nourrir une telle chimère… Et si tous ne succombent pas totalement au mythe, tous l'ont au moins un instant accrédité.

[Dans les colonnes du quotidien de référence, chaque déclaration d'un officiel de Saddam Hussein est suivie,] comme à l'accoutumée, [par] de longs extraits du discours. [« Bagdad va être le haut lieu de la résistance » et « Par sursaut patriotique, des civils rejoignent les forces irakiennes », titre le quotidien que] l'on aurait presque envie de rebaptiser La Gazette de Saddam. [En effet,] Rémy Ourdan ne cache pas son optimisme pour la stratégie du dictateur.

[Ce journaliste] est prêt à se battre jusqu'au dernier Bagdadi… « Pour les Bagdadis, il n'y a pas de doute, s'émerveille Rémy Ourdan … Saddam Hussein, bombardé, harcelé, traqué, s'offre, alors que l'assaut final contre Bagdad paraît imminent, un incroyable geste de défi contre l'Amérique en guerre. »

Et qu'en est-il vraiment?

…la bataille de Bagdad … se révèle à sens unique. Les colonnes de GI et de marines, appuyées par des avions et des hélicoptères, vont où elles veulent, quand elles le veulent. … Les fantasmes de résistance patriotique, de lutte acharnée maison par maison ont montré leur peu de consistance. Point de « Saddamgrad ». … Un tel trimphe américain sidère les contempteurs de la guerre « illégale ». … alors que la statue monumentale de Saddam Hussein s'effondre au centre de Bagdad, il faut voir les mines et les visages crispés dans les salles de rédaction pour saisir l'ampleur de la désillusion" [souligné par moi].

…les éditorialistes du 10 avril ne dissimulent guère leur dépit. … Les mots « libération » et « liesse » ne figurent dans aucun des gros titres en manchette des journaux publiés le 10 avril. Ils préfèrent « La Chute », « La chute de Bagdad », « La chute et le chaos », « Chute de Bagdad, traque de Saddam » ou « Bagdad est tombé ». Ne cherchez pas non plus dans les innombrables surtitres, sous-titres, appels ou accroches de une imprimés en gras de première page. Seule La Croix glisse une phrase qui ne restera pas dans les annales de l'emphase journalistique : « Les troupes américaines, saluées par une partie des habitants, ont "libéré", hier, la quasi-totalité de Bagdad. » Libéré se trouve relativisé par des guillemets…

Devant cet acharnement à vouloir diaboliser les vainqueurs de la guerre d'Irak, on reste évidemment interdit.

Quelle est la conclusion? Et que nous réserve l'avenir?

L'antiaméricanisme a certainement été l'élément fédérateur le plus fort. À cela s'ajoute que les journalistes croient tous en savoir assez sur les États-Unis pour les juger, mais que bien peu ont pris la peine de découvrir les réalités de cette société et d'étudier ses ressorts. La détestation de l'Amérique a été brutalement réactivée…

…la fonction de prophète des malheurs américains a encore de beaux jours devant elle dans la presse francaise.



© Alain Hertoghe

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